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L’été, il y a des journées de soleil qui nous ramènent à notre propre lumière. Ouvrir le roman Alexis Zorba, c’est retrouver cet état, peu importe le mois de l’année.
Titre | Alexis Zorba
Auteur | Níkos Kazantzákis
Genre | Fiction
Pays | Grèce
Année de parution | 1946
Nombre de pages | 348
💈 (TLPL) « Trop long, pas lu »
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- Lire le roman
Alexis Zorba : la lumière des îles
Je suis tombé sur le roman il y a quelques années dans une librairie usagée du Plateau, à Montréal.
C’était le début de l’été, et la petite aquarelle sur la couverture me laissait entrevoir un périple que je n’avais pas les moyens de me payer.
Mes parents ont fait leur voyage de noces en Grèce, les soupers de moussaka étaient courants à la maison. J’imagine que j’ai un penchant naturel pour la culture hellénique.
On parle souvent, c’est même un peu cliché, du « roman qui fait voyager ». N’ayons pas peur des mots. Il s’agit bel et bien de cela.
Ouvrir le roman, c’est s’envoler pour la Crète. C’est découvrir la vie des paysans en 1930. Lire Alexis Zorba, c’est retrouver la passion qui nous habite, qui nous élève.
Résumé
(Un résumé qui n’en dévoile pas trop!)
Le narrateur du roman, Basil, est un auteur, un intellectuel. Comme il traverse un passage à vide, il décide de mettre ses travaux en pause pour se rendre en Crète, une île grecque. Il vient de racheter une vieille mine de lignite et espère se retrouver dans le travail physique et la vie paysanne.
Le roman s’ouvre dans un café du port d’Athènes. Il pleut des cordes et Basil attend son bateau. Il fait alors la rencontre d’Alexis Zorba, un homme d’une soixantaine d’années, qui est à ce moment-là un peu éméché, mais qui arrive à convaincre Basil de l’engager comme contremaître.
Une fois sur l’île, ils logent à l’auberge de madame Hortense, une ancienne courtisane flétrie qui retrouve un peu de sa jeunesse au contact de Zorba. Basil et Zorba commenceront ensemble le travail pour rouvrir la mine et découvriront leurs voisins du village.
On suivra donc, d’une part, leur intégration à la vie de l’île et de l’autre côté, l’évolution de leur périlleuse entreprise minière.
À travers ces péripéties, Zorba se raconte : ses amours, sa vie de famille, son expérience à la guerre. Il parle de ses souvenirs sans détour, avec tendresse et passion.
Mais le point central du roman reste la rencontre entre Zorba et Basil. Toute la complexité de l’œuvre se trouve dans leur relation d’amitié. Elle est à la fois simple et profonde, unique et universelle. Elle donnera lieu à plusieurs échanges philosophiques sur l’amour, le travail, la vie ou la mort.
Sans être une célébration de l’amitié, le roman est une ode à la vie, à notre capacité à descendre au plus profond de nous-mêmes pour nous réclamer.
« Tous les hommes ont leur folie, mais la plus grande folie, m’est avis que c’est de ne pas en avoir. »
Thèmes
La vision du travail
L’auteur, Níkos Kazantzakis, a grandi en Crète. C’est probablement pourquoi il arrive à brosser un portrait si précis du peuple crétois des années 30. On découvre la vie rurale et la nature impitoyable de l’homme lorsqu’il est en survivance.
On assiste aussi au choc de deux visions bien différentes. Le narrateur veut appliquer ses idéaux socialistes avec ses employés, alors que Zorba prêche pour l’approche du bâton et de la carotte.
Il y a cette réalité en filigrane tout au long du roman : la rencontre entre une position mentale noble (mais théorique) et la dure réalité de la vie.
La nature de l’homme
Zorba est loin d’être parfait. Lorsqu’il raconte son passé, on découvre qu’il a commis pratiquement tous les crimes imaginables. Même s’il n’a rien d’un intello, il a une bonne capacité d’introspection. Zorba se décrit comme un homme bon, mais incapable de résister à ses pulsions.
Pour lui, nous sommes des animaux et répondons à nos instincts primaux. Ne pas reconnaître ce fait, c’est nier la réalité.
Sa vie est simple, mais intense. Il boit, il mange, il danse, il rit, joue du santouri. Pour lui, se poser trop de questions rend malheureux. Il ne dira jamais quelque chose qu’il ne pense pas. Ne fera jamais quelque chose s’il ne le sent pas. C’est un vrai.
Les femmes lui font perdre la raison. Il a d’ailleurs une vision complexe de la femme, qu’il voit comme un être semi-diabolique, demi-déesse. (Il peut utiliser un langage offensant pour parler des femmes, mais on comprend aussi qu’il exprime aussi son propre rapport de dépendance.)
Il réclame le droit d’exprimer toute émotion : la joie comme la douleur. Et lorsque les mots ne peuvent exprimer ce qu’il a sur le cœur… il danse.
Extraits
Le livre est rempli de magnifique description de la Crête. Évocatrices sans être complaisantes, jamais trop longues. Du grand art :
❝À la fin de l’après-midi, nous abordâmes à notre rivage sablonneux. Un sable blanc, finement tamisé, des lauriers-roses encore en fleur, des figuiers, des caroubiers et, plus loin, à droite, une petite colline basse et grise, sans un arbre, ressemblant à un visage de femme renversé. Et sous son menton, sur son cou, passaient les veines brun sombre du lignite. Un vent d’automne soufflait, des nuages effilochés passaient lentement et adoucissaient la terre en la couvrant d’ombre. D’autres montaient du ciel, menaçants. Le soleil se couvrait et se découvrait, et la face de la terre s’éclairait et s’obscurcissait comme un visage vivant et troublé.❞
Zorba enseigne à son ami auteur à exprimer les émotions au lieu de les intellectualiser :
❝Qu’est-ce que tu as à me regarder ? Je suis comme ça. Il y a en moi un diable qui crie et je fais ce qu’il me dit. Chaque fois que je suis sur le point de suffoquer, il crie : « Danse! » et je danse. Et ça me soulage! Une fois, quand mon petit Dimitraki est mort, en Chalcidique, je me suis encore levé comme ça et j’ai dansé. Les parents et les amis qui me regardaient danser devant le corps, se sont précipités pour m’arrêter. « Zorba est devenu fou ! qu’ils criaient, Zorba est devenu fou ! » Mais moi, à ce moment-là, si je n’avais pas dansé, je serais devenu fou de douleur. Parce que c’était mon premier fils et qu’il avait trois ans et que je ne pouvais pas supporter sa perte. Tu comprends ce que je te dis, patron, ou bien est-ce que je parle aux murs ?❞
Un peu comme dans l’œuvre de Tchékhov, il y a une certaine glorification du travail dans le livre. C’est un des autres beaux aspects du roman. On voit la puissance d’avoir dans sa vie, une vocation ou un métier qui nous comble. Zorba ne cherche pas à se réaliser, il se réalise dans ce qu’il fait :
❝Le lendemain, avant le jour, les galeries résonnaient des coups de pics et des cris de Zorba. Les ouvriers travaillaient avec frénésie. Seul Zorba pouvait les entraîner ainsi. Avec lui, le travail devenait vin, chant, amour et ils s’enivraient. La terre prenait vie dans ses mains. Les pierres, le charbon, le bois, les ouvriers adoptaient son rythme, une guerre éclatait dans les galeries, sous la lumière blanche de l’acétylène et Zorba allait de l’avant et luttait corps à corps. Il donnait un nom à chacune des galeries et à chacun des filons, il donnait un visage aux forces sans visage et, dès lors. il leur devenait difficile de lui échapper.❞
Critique
Le roman débute rapidement. On est sur l’île à la page 39 et dès lors, on est happé. C’est d’ailleurs ce qui est formidable : pour une œuvre de cette profondeur, le récit est clair, la construction narrative est à la fois simple et forte.
L’écriture au passé simple est fluide, poétique et éblouissante. On dit parfois que le travail de l’art est de cacher l’art. Ce roman en est la preuve parfaite. Les réflexions, les descriptions, les questionnements philosophiques s’imbriquent de manière harmonieuse sans jamais gâcher le rythme.
Je n’ai pas souvenir d’avoir lu de pages en diagonales parce que le roman s’enlise dans une longue description ou une introspection de 12 pages. Pour moi, l’équilibre est une des grandes qualités du roman.
On tombe aussi sur plusieurs phrases qui nous font déposer le livre et regarder l’horizon.
« La vie de l’homme est une route avec montées et descentes. Tous les gens sensés avancent avec un frein. »
Le livre est un animal rare : il marque. Il fait voyager, fait rêver.
Le roman est une sorte de réflexion sur le bonheur. L’auteur est cultivé, informé, éduqué. Pourtant, il réalise que Zorba a quelque chose qui lui échappe. C’est le questionnement philosophique qui traverse l’œuvre.
J’ai lu ce roman dans une période où j’étais un peu égaré et, comme le narrateur, j’étais dans mes constructions mentales, dans la théorie au lieu d’être dans la pratique. Comme dit Basil, le personnage de l’auteur :
« Si j’avais eu à choisir entre tomber amoureux ou lire un bon livre sur l’amour, j’aurais choisi le livre. »
La rencontre de Zorba m’a frappé de plein fouet.
Elle m’invitait à remonter en selle et à vivre avec plus d’ardeur.
➤ Note et verdict
(TLPL)
« Explique-moi Alexis Zorba comme si j’avais cinq ans »
C’est un livre à propos d’un monsieur sérieux qui devient ami avec un monsieur vraiment drôle. C’est une belle histoire.
Note d’appréciation perso : ★★★★1/2
Note goodreads (+ de 40 000 votes) : ★★★★
Alexis Zorba apparaît sur la liste des 100 meilleurs livres de tous les temps selon le Cercle norvégien du livre.
Vous aimerez si :
- Vous souhaitez découvrir la Crète
- Vous voulez vous faire un nouveau meilleur ami fictif
- Vous cherchez un roman à l’équilibre parfait (récit, descriptions, réflexions)
Vous n’aimerez pas si :
- Difficile de trouver quelque chose…vous n’aimez pas le passé simple??
- Un personnage qui utilise un langage vétuste pour décrire la femme gâcherait votre plaisir
Lire Alexis Zorba
Nouvelle traduction!
🇫🇷 La Fnac (FR)
Format poche
🇫🇷 La Fnac (FR)
Avant de se quitter…
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Je pense que j’ai quelque chose pour vous.
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Crédit photo de couverture : Jr Harris sur Unsplash
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