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Un voyage dans le temps qui nous ramène à l’une des périodes les plus horribles de l’histoire américaine. Cœurs sensibles, s’abstenir.
Titre | Méridien de sang
Auteur | Cormac McCarthy
Genre | Fiction historique, Western
Pays | États-Unis
Année de parution | 1985
Nombre de pages | 480
💈 (TLPL) « Trop long, pas lu »
- Sauter le bla bla et se rendre directement au verdict final
- Lire le roman
Méridien de sang : quand l’humanité voit rouge
Lorsqu’on parle de westerns (films ou romans), on peut diviser le public en trois grandes catégories :
Il y a ceux qui ne veulent rien savoir. Ça ne les intéresse pas.
Il y ceux qui voient le genre comme quelque chose d’amusant, « oui, oui, le western spaghetti : une fois de temps en temps, avec un bon rouge, je ne suis pas contre. »
Finalement, il y a ceux qui aiment véritablement l’univers. Ils sentent une connexion avec cette époque chaotique, qui les ramène à l’enfance problématique de l’Amérique.
Méridien de sang (Blood Meridian), considéré comme le chef-d’œuvre de Cormac McCarthy, l’un des grands auteurs américains du 20e siècle, s’adresse aux lecteurs de cette troisième catégorie.
Je ne pense pas qu’on puisse apprécier le livre si on n’aime pas un peu le genre à la base. Car il s’agit exactement de ça : un roman western. Une histoire inspirée de faits réels, qui se déroule durant la conquête et la colonisation du Far West. Une œuvre d’une violence inouïe, pour une époque de survivance et de massacres.
Vous avez aimé La Route, roman le plus connu de McCarthy et souhaitez poursuivre la découverte de son travail?
Voici un avis personnel sur ce livre exigeant, dérangeant, que le critique américain Harold Bloom a qualifié de « western ultime ».
Mise à jour | Au printemps 2023, on annonçait que le livre allait être porté à l’écran par le réalisateur John Hillcoat, qui avait aussi adapté La Route. Raison de plus pour ne pas attendre que les premières images du film viennent gâcher votre propre construction de l’horrible monde de McCarthy. Conseil d’ami? Lisez le livre plus tôt que tard!
Résumé
(Un résumé qui n’en dévoile pas trop!)
Le livre est inspiré par les massacres commis par John Joel Glanton et ses hommes, des mercenaires qui ont terrorisé et mutilé les Apaches vers la fin des années 1840.
L’action prend place dans les espaces désertiques du Texas et dans la Sierra Madre (chaîne de montagnes, du côté pacifique, qui débute à 50 km de la frontière États-Unis-Mexique et traverse le Mexique).
Un jeune de 14 ans, « l’enfant » (il ne sera jamais nommé autrement) a fui sa maison et part faire cavalier seul. Sa mère est morte à sa naissance. Son père ne dessaoule jamais. Il ne sait ni lire ni écrire. Il est sale, il a faim. Il part parce qu’il ne peut plus rester. Déjà la survie.
On est à la première page.
Après une altercation avec un tenancier de bar, qui nous apprend que l’enfant sait se défendre, il fait la rencontre d’une milice qui prévoit se rendre au Mexique pour établir la domination des Blancs américains. Leur périple est à peine commencé qu’ils sont attaqués par un groupe de guerriers Apaches. L’enfant, un des rares survivants de l’attaque, est finalement arrêté au Mexique, passe un mauvais moment en prison, est fait esclave, puis racheté par un homme qu’on appelle le juge Holden.
Ils rejoignent John Joel Glanton et ses hommes et l’aident à mettre sur pied une milice qui traquera les Apaches afin de les scalper et d’en tirer une prime remise par le gouvernement mexicain.
Ils tuent, pillent, mutilent. Il n’existe plus aucune ligne entre le bien et le mal. La bande se retrouve sur la liste des hommes les plus recherchés du Mexique. On est rendu au point ridicule où le gouvernement mexicain ne sait même plus qui il veut tuer entre les Apaches ou la bande de Glanton.
On suivra donc le groupe dans leurs voyages avec, en tête, l’enfant et le juge Holden, dont la devise préférée est :
« Tous les faibles du monde doivent être éliminés pour que les forts puissent survivre. »
Ne retenez pas votre souffle pour les passages plus légers.
Thèmes
On a souvent glorifié la colonisation de l’Ouest américain : la recherche d’une vie meilleure. On l’a simplifiée : les « sauvages » et les cowboys.
L’histoire est racontée par les vainqueurs.
Il n’y a pas de stéréotypes dans l’œuvre McCarthy. Il nous présente le monde comme on nous le présente dans la bible. Un monde de souffrance. Un monde sans loi, sans morale. Il n’y a pas de « bons » dans le roman. Les blancs comme les non-blancs sont assoiffés de sang.
Comme dans tout le travail de Cormac McCarthy, la question du bien et du mal, de la responsabilité face aux hommes et face à dieu, est omniprésente.
La violence est partout : dans l’action comme dans les descriptions. Des corps sont accrochés à des arbres, des cadavres gisent dans les rues. Le livre fait écho, d’une terrible façon, au rêve américain sous l’angle de la domination raciale et de l’expansion impériale sans limites.
Style
On a qualifié le style d’écriture de Méridien de sang de quasi biblique. On l’a comparé à Moby Dick, pour son caractère épique.
Effectivement, la grande réussite de l’œuvre réside beaucoup dans sa prose. Grave, mystique, chargée de symboles. Son lyrisme sert à installer l’ambiance apocalyptique, qui perdure à travers tout le roman. Voyez par vous-même :
« Au matin un soleil hagard couleur d’urine se leva à travers des panneaux de poussière sur un monde flou et indistinct. Les animaux n’en pouvaient plus. Ils s’arrêtèrent et établirent un bivouac sec sans bois et sans eau et les pitoyables poneys se blottissaient et pleurnichaient comme des chiens. »
L’aspect épique est aussi exacerbé par la façon d’écrire de McCarthy qui utilise rarement la virgule (préférant souvent le « et ») ainsi que par le ton solennel des descriptions.
Sa façon unique d’aligner des phrases particulièrement courtes avec d’autres, particulièrement longues, est aussi une des signatures stylistiques du livre.
Extraits
Une description des périples de Glanton et ses Hommes :
❝Pendant deux semaines ils allaient se déplacer de nuit, ils n’allumeraient pas de feu. Ils avaient déferré leurs chevaux et bouché les orifices des clous avec de la terre et ceux qui avaient encore du tabac leur blague leur servait de crachoir et ils dormaient dans des grottes et sur la pierre nue. S’ils mettaient pied à terre ils faisaient passer leurs chevaux sur leurs traces et ils enfouissaient leurs excréments comme les chats et ils se parlaient à peine. Quand ils traversaient dans la nuit ces récifs nus de gravier on eût dit des créatures sans attache ni substance. Une patrouille condamnée à chevaucher sans fin pour expier une antique malédiction.❞
Un exemple de la nature lyrique, biblique des descriptions :
❝En traversant les salicornes il se retourna. Le cheval n’avait pas bougé. Les feux d’un navire clignotaient dans la houle. Le poulain se pressait contre le cheval avec la tête penchée et le cheval regardait au loin, là-bas où s’arrête le savoir de l’homme, où les étoiles se noient, où les baleines emportent leur âme immense à travers la mer sombre et sans faille.❞
Critique
C’est quelque peu difficile de dire qu’on a « aimé » ce livre.
C’est tellement sombre. D’ailleurs le ton apocalyptique, l’abus volontaire du champ lexical négatif (terrible, pitoyable, affreux) peut lasser. Je dois dire qu’à certains moments, les descriptions arides devenaient pour moi un peu floues, pas si loin d’une traversée du désert, justement.
Mais l’histoire est prenante et les scènes d’action arrivent à donner du rythme au récit.
Je resterai toujours en admiration avec la portée du roman. Difficile de mettre des mots là-dessus, mais à travers la terrible beauté de l’écriture, on sent le poids de l’histoire ainsi qu’une profonde réflexion sur l’humanité.
Méridien de sang est devenu aujourd’hui l’un des morceaux les plus étudiés et les plus discutés de la littérature américaine des trente dernières années. Le New York Observer disait à son sujet qu’elle était : « l’œuvre la plus aboutie de la littérature américaine contemporaine ».
J’écris ces lignes en pleine course électorale américaine. On se demande si les États-Unis ne se dirigent pas vers une nouvelle guerre civile. À propos de la crise raciale qui sévit en ce moment, un auteur affirme, en entrevue à une journaliste :
« C’est comme en 1859, tout le monde est en colère à propos de quelque chose et tout le monde a une arme ».
Le récit de Méridien de sang n’est malheureusement pas si loin de nous.
À lire, si l’on se sent assez solide.
➤ Note et verdict
(TLPL)
« Explique-moi Méridien de sang comme si j’avais cinq ans »
C’est une histoire de cowboys, mais c’est un livre pour les grands.
Note d’appréciation perso : ★★★ 1/2
Note goodreads (+ de 114 000 votes) : ★★★★
Méridien de sang apparaît sur la liste des 100 meilleurs romans selon le TIME Magazine.
Vous aimerez si :
- Vous aimez les westerns
- Vous avez envie d’une œuvre à la portée quasi biblique
- Vous souhaitez découvrir une plume unique, grandiose, exigeante
Vous n’aimerez pas si :
- Vous ne supportez pas la violence
- Vous cherchez un roman qui se lit facilement
- Vous supportez mal les longues descriptions de paysages
Lire Méridien de sang
Grand format
🇫🇷 La Fnac (FR)
Format poche
🇫🇷 La Fnac (FR)
Avant de se dire adieu…
Vous voulez découvrir des écrivains américains ou anglophones célèbres et leurs œuvres incontournables? J’ai quelque chose pour vous : la liste des 100 meilleurs romans de langue anglaise selon le TIME Magazine.
Vous y trouverez des romans qui vous offrent un aperçu de la diversité et de la richesse de la littérature américaine ou de langue anglaise.
Je peux vous garantir que vous ferez quelques trouvailles!
Crédit photo de couverture : Ashim D. Silva sur Unsplash
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